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Mardi 10 mai 2016
20h30
Théâtre
de Charleville-Mézières
ERIK TRUFFAZ QUARTET
photo Hamza Djenat
Erik Truffaz : trompette
Marcello Giuliani : basse
Arthur Hnatek : batterie
Benoît Corboz : piano
voir teaser du nouvel album Doni Doni
en partenariat avec le Théâtre de Charleville-Mézières
tarif plein : 20 €
Abonnés Théâtre, Adhérents CAJ :17 €
Etudiants, demandeurs d'emploi : 12 €
Réservations : Théâtre 03 24 32 44 50
Plus de vingt ans de carrière, dix-huit disques dont dix-sept sur le label mythique Blue Note, des tournées extensives dans le monde entier : le succès du trompettiste Erik Truffaz et de son quartet est constant. Les ventes cumulées de ses albums se chiffrent à 500 000, un record dans le monde du jazz.
Les oreilles ouvertes aux sons du monde, du plus lointain Orient aux dernières évolutions électroniques, Erik Truffaz n'a cessé d'explorer et fusionner les genres : tourneries grooves du funk et de la soul, ambiances planantes, expressions musicales de l'Inde, détours par le Mexique, l'Afrique, le jazz acoustique...
Après des rencontres avec des musiciens du monde entier, des collaborations avec le chanteur Christophe, le dessinateur Enki Bilal, Erik Truffaz retrouve avec bonheur la formule du quartet, avant tout une entité collective, un son, une dynamique de groupe.
Nouveau casting, nouvelle énergie, nouveau son ;
après 3 ans d'absence discographique, le nouvel ERIK TRUFFAZ QUARTET est de retour.
Marc Erbetta, le batteur historique du groupe, cède désormais sa place à du sang neuf en la personne d’Arthur Hnatek, jeune musicien émigré depuis plusieurs années à New York et qui officie notamment avec Tigran Hamasyan derrière les fûts.
Nouvelles influences aussi, suite à la collaboration scénique avec la compagnie de danse Sud-Africaine VUYANI, et le spectacle KUDU qu'ils ont monté et tourné ensemble ces deux dernières années.
Une métamorphose en douceur qui donnera naissance à un nouvel album "Doni Doni" paru chez Parlophone en janvier 2016.
Toujours à la frontière ténue du Jazz et de la Pop instrumentale, toujours sur le fil, entre originalité et accessibilité, le ERIK TRUFFAZ QUARTET, fidèle à une tradition établie depuis de nombreux albums, invite deux voix à cette communion des mots et des notes : Rokia Traoré (victoire de la musique 2009) et Oxmo Puccino (victoire de la musique 2010 et 2013).
La chanteuse malienne est venue envoûter trois chansons de son timbre doux et mystérieux, alors que Oxmo Puccino, ami de longue date que l'on trouvait déjà sur le dvd "Paris Tour", a posé sa voix sur un titre.
Deux personnages, deux artistes, deux caractères vocaux diamétralement opposés, que la musique du ERIK TRUFFAZ QUARTET, jouant sur les osmoses autant que les contrastes, va pourtant réunir et fusionner.
À la fois savante et populaire, la musique est accessible, tout en respectant une notion de recherche et d’originalité.
photo Nathalie Pallud
"Le terme de « fusion » a été régulièrement employé pour décrire l’approche musicale du trompettiste et compositeur Erik Truffaz. Du jazz à l’électronique, du rock aux musiques dites « du monde », le recours à une diversité de codes harmoniques et mélodiques, de métriques, va chez lui bien au-delà de l’effet, de l’ornement. Tout comme la mise en jeu de diverses voix selon les enregistrements. Celles de Rokia Traoré et d’Oxmo Puccino sont présentes pour cinq des dix compositions de l’album Doni Doni. Douce, en intimité de souffle avec la trompette pour Rokia Traoré, à quatre moments, dont le très touchant Seydou. Au cœur d’une manière pop-soul, en fluidité swing pour Oxmo Puccino dans Le Complément du verbe. Le va-et-vient entre instrumentaux (que cela soit dans la dynamique de Kudu, l’étalement lyrique de Szerelem, la tension rock de Fat City) et chansons est fort bien conçu. Moins thématisé que d’autres disques de Truffaz, Doni Doni peut aussi s’entendre comme une anthologie, fort réussie, de ses principales explorations."
Sylvain Siclier Le Monde 22/01/2016
"Aficionados de la trompette son nature, amateurs d’écho ou réverbération en souvenir du Miles électrique, tenants du son feutré de l’éternelle trompette jazz bouchée y compris: chacun peut aller écouter le nouveau projet du musicien suisse. Sur scène, donnant donnant, Erik Truffaz fait en sorte de de les réconcilier tous."
Robert Latxague Jazzmagazine.com
"Erik Truffaz appartient, comme Miles Davis, à cette catégorie - très rare - de musiciens avares de notes qui misent sur l'apesanteur, le feutré, le silence, le voilé pour créer un monde à partir d'une phrase ou d'un son, tout en laissant une allusion, une ellipse se charger de la suite."
Le Monde
"Mélange subtil de rythmes jungle, de be-bop et de hip-hop, le travail du trompettiste Erik Truffaz a marqué le jazz français d'un vent de fraîcheur. A la frontière entre les excursions psychédéliques de la musique électronique et les pérégrinations old school d'un Chet Baker, il a su trouver un délicat équilibre, s'affranchissant des chapelles sans les renier".
Le Figaro Magazine
photo Hamza Djenat
ERIK TRUFFAZ QUARTET, 20 ans d'histoire ....
Un parcours d’expérience(s) : c’est ainsi que pourrait, à grands traits, être
décrite la sinueuse ligne de fuite dessinée depuis près de deux décennies
par l’Erik Truffaz Quartet.
A la fin des années 90, The Dawn puis Bending
New Corners jetaient d’emblée des ponts inédits entre les
expérimentations de la drum’n’bass, l’énergie poétique et urbaine du hiphop,
les richesses climatiques de l’ambient, la liberté du jazz. C’était le
point de départ déjà très ouvert d’une histoire d’hommes en quête
d’aventures sonores, d’horizons formels élargis, mais aussi d’affinités
toujours redéfinies, de nouveaux regards poétiques – et donc politiques –
sur le monde. Parée d’atours plus rock (The Walk of the Giant Turtle) et
pop (Arkhangelsk), traversée de motifs empruntant à la pure plastique des
sons (El Tiempo de la Revolución), visitée par des voix venues de multiples
horizons (le rapper Nya, Christophe, Ed Harcourt, Sophie Hunger, Anna
Aaron…), la musique du Quartet, au-delà des cadres et des écoles, aura
au fond toujours relevé de la fusion. Une fusion au sens le plus noble du
terme, décapé des pesantes connotations qui lui sont trop souvent
rattachées. Une fusion synonyme de vérité humaine, d’ébullition des
esprits, de synchronisation des cœurs, de complicité des gestes.
Trois ans après El Tiempo de la Revolución, on en tient encore la preuve
avec Doni Doni. Par son seul titre, qui signifie “petit à petit” en langue
bambara du Mali, ce nouvel album résume cette capacité à la fois
instinctive et raisonnée de se réinventer étape par étape, de se développer
avec la savante légèreté d’un organisme en expansion.
Premier
changement : le Quartet y redéfinit son alchimie interne, avec l’arrivée
d’Arthur Hnatek en lieu et place du batteur historique Marc Erbetta.
Révélé à la croisée des chemins de traverse ouverte par le pianiste Tigran
Hamasyan, le jeune prodige suisse de 25 ans mêle idéalement son sens du
placement, de la pulsation et du son à la pâte musicale composée par la
trompette d’Erik Truffaz, la basse de Marcello Giuliani et les claviers de
Benoît Corboz.
Deuxième changement : pour intégrer au mieux ce
nouvel élément, le Quartet a posé les bases et pétri la matière de Doni
Doni pendant douze jours de répétition – un processus insolite pour ce
collectif habitué à capter son inspiration directement en studio, dans le
vif de l’enregistrement.
Troisième changement, enfin : c’est aux Studios
ICP de Bruxelles que les quatre hommes ont choisi de donner forme(s) à
leur ouvrage, loin du familier Studio du Flon de Lausanne, tenu par
Benoît Corboz, où le Quartet avait jusque alors coutume de fédérer ses énergies. “Cette limite-là, on ne l’avait jamais repoussée depuis 18 ans, témoigne
Benoît Corboz, qui mixe et masterise depuis toujours les productions de
l’ensemble. L’espace du studio étant plus grand qu’à l’accoutumée, il a ouvert une
autre perspective : nous étions moins les uns sur les autres, chacun s’est retrouvé plus
libre de faire ce qu’il voulait. Nous avons davantage laissé les choses advenir comme
des jets, c’était à la fois plus fluide et moins maîtrisé. Si bien que, pour moi, au
moment de réaliser le mix, ça a été un peu la surprise : en terme de son, j’ai eu le
sentiment d’ouvrir les casseroles et de découvrir ce qu’il y avait dedans !”
Avec ces paramètres renouvelés, le Quartet affine et précise sa cuisine
interne : celle d’une formation qui, sans cesse, s’en remet aux beautés
mouvantes de l’empirique. Adoptant les contours d’un groove à la fois
fauve (Doni Doni part 2 ou Kudu, inspiré par le spectacle du même nom
créé avec le Vuyani Dance Theatre du chorégraphe sud-africain Gregory
Maqoma) et élastique (Pacheco), d’un art qui se plaît à unir phrasés
suspendus (Szerelem) et sonorités abrasives (Fat City), Doni Doni trouve
son unité dans une même volonté de pulvériser les barrières des genres.
“Dans le travail, nous partons toujours dans le vide, rappelle Erik Truffaz.
Chacun prépare des choses, apporte des idées, mais l’essentiel provient d’improvisations
enregistrées, triées et retravaillées. La première fois qu’on se réunit, on s’ouvre une
piste, et puis une autre, et chacun de son côté continue ensuite ce qui a été trouvé : c’est
ainsi que s’assemble le puzzle.”
Une approche sur le fil de l’instinct, que
Benoît Corboz résume à son tour ainsi : “Au moment de la composition,
devant la page blanche, ça reste toujours fragile : nous nous mettons dans un état où
nous nous retrouvons à la merci du doute, où nous sommes facilement déstabilisés.
Mais l’amitié qui nous relie nous permet de dépasser ces moments-là, et il en sortira
finalement quelque chose que nous pourrons utiliser.” Dans Doni Doni, les quatre
musiciens habitent ainsi en maîtres aériens les reliefs changeants d’une
musique qui trouve sa signature esthétique au point d’équilibre entre riffs
de basse et mélodies filées, motifs rythmiques fermement tracés et
mixtures sonores formidablement évasives. Ou encore entre les
merveilleux hasards de l’improvisation et les beautés immédiates du
format pop – les deux passions revendiquées du Quartet. “J’estime que
nous avons toujours joué de la pop : le jazz, nous ne savons pas faire, nous ne sommes
pas des be-boppers, nous sommes déconnectés d’un cadre conventionnel, renchérit
Erik Truffaz. Le jazz nous intéresse beaucoup, mais à la base il n’était pas notre
revendication d’adolescents.”
Cette mise à distance intuitive des académismes de tout poil, qu’on
pourrait même qualifier d’ingénue tant elle s’exprime sans le moindre
calcul, fait le sel des visions du Quartet. Dans Doni Doni, ce dernier s’en
remet une fois encore à la force vibratile des échanges entre musiciens,
au-delà de toute volonté de démonstration virtuose. “Nos disques ne sont
pas vraiment basés sur la technique, nous ne construisons pas nos pièces sur des thèmes
difficiles, affirme Marcello Giuliani qui, parmi les musiciens qui l’ont éveillé, ne cite pas sans raison des magiciens du son comme Miles Davis,
Herbie Hancock, Brian Eno, Robert Fripp, David Sylvian, les
pensionnaires du label ECM ou encore le producteur et musicien
américain T. Bone Burnett. Le plus souvent, nous nous basons davantage sur des ambiances, des couleurs ou des palettes que sur des prouesses instrumentales. Nous
apportons beaucoup de soin à la mise en espace et à la respiration de la musique, en
bossant la majeure partie du temps comme si Erik était le chanteur du groupe.”
Cette attention maximale apportée à la trame sonore, perceptible dans
chacune des mesures de Doni Doni, dénote une sensibilité commune qui
relève au moins autant de l’art pictural que du plaisir concret d’agencer et
de faire résonner les sons. “Les notes découlent de la matière, confirme Benoît
Corboz. La musique du Quartet n’est pas de celles qui s’écrivent sur une partition
avant d’être interprétées. Chacun met sa part de charbon dans la locomotive ; et c’est
comme ça, un peu au hasard, qu’elle va commencer à carburer. Si la matière de Doni
Doni s’est créée un peu différemment, c’est bien ce même but que nous avons tous
poursuivi. Au bout du compte, les climats et les styles de l’album sont variés, mais au
départ il y a toujours cette idée de matière qui a fermenté à notre sauce. Cette sauce, on
peut lui donner des noms différents, mais elle a son unité, elle garde la tonalité et le
goût du Quartet. Nous travaillons dans cette confiance-là. Je ne sais pas d’où nous la
tenons… Sans doute du fait que nous avons toujours travaillé comme cela.”
Pour qui voudra éprouver pleinement ce qui constitue le souffle éminemment singulier du Quartet, il suffira d’écouter l’époustouflant
contenu de la Bruxelles Session, le CD bonus inclus dans l’édition Deluxe
de Doni Doni. Là, en vingt minutes de lâcher prise collectif, saisi en une
seule prise dans l’intimité du studio, l’entité hors norme qu’est l’Erik
Truffaz Quartet trouve encore à se développer, à approfondir son
rapport au temps, aux atmosphères, au silence et à l’écoute.
“Un soir, à la
fin des sessions de l’album, nous avons préparé un set up sonore pour accueillir Rokia
Traoré, qui devait improviser avec nous, raconte Benoît Corboz. Il en est sorti
cette longue pièce instrumentale, qui est partie complètement à la volée et résume bien
notre travail.” Le fait que cette échappée improvisée soit née d’un travail
préparatoire avec une voix invitée n’est pas le fruit d’une pure
contingence. Car, dans Doni Doni comme dans les précédents opus de
l’Erik Truffaz Quartet, la césure entre plages instrumentales et hantées
s’estompe de fort poétique manière. Et la longue et libre parole du
groupe trouve une fois encore son écho et son prolongement naturels
dans la présence de timbres passe-murailles.
Montant dès les premières
notes de Comptine 1, le chant nomade de la Malienne sans frontières
Rokia Traoré, plus que jamais affranchi de tout ancrage, déploie ainsi
toute une gamme de frémissements en planant sur les plages de Djiki’n,
Doni Doni part 1 et Seydou. Dans un flow aérien, Oxmo Puccino, une
vieille connaissance du Quartet, signe quant à lui en point d’orgue de
l’album un complément du verbe qui, telle une adresse conjointe à l’auditeur
et aux musiciens, n’affirme pas par hasard : “Nous créons la matière dans
laquelle tu puises ton plaisir/Qui nous nourrit”. Pour le Quartet, les sources de
ce plaisir offert en partage se trouvent dans ce goût de rebattre les cartes
de son jeu, et d’y glisser sans cesse de nouveaux atouts.
Et c’est ainsi
qu’avec Doni Doni, il réinvente une fois encore cette alliance secrète du son, du sens et de la sensation qui, depuis ses origines, alimente sa force motrice et mobile.
Jazz Magazine Mars 2016
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