Mardi 12 janvier 2010

Auditorium de l'ENMD
CHARLEVILLE-MEZIERES

EMILE PARISIEN QUARTET



Emile Parisien : saxophone soprano
Julien Touery : piano
Ivan Gelugne : contrebasse
Sylvain Darrifourcq : batterie

On parle beaucoup d'Emile Parisien depuis quelque temps, mais on devait plus exactement mentionner le quartet : Emile et ses compagnons apparaissent dès le début du concert comme un groupe, et non pas comme un saxophoniste et ses accompagnateurs. D'ailleurs, les compositions peuvent être signées collectivement, ou par chacun des 4 membres de la formation.

Ils attaquent le concert par une improvisation qui va se poursuivre par une composition sans que l'on sache où se situe la frontière. Il faut dire que ce quartet possède la faculté rare de marier rigueur et liberté. Bien que l’on puisse distinguer un certain nombre d’influences, ce groupe parvient à imposer un univers très personnel, démontrant que toutes ses sources d’inspiration ont été parfaitement digérées. Grâce à un jeu très expressif porté par une grande maîtrise technique, la musique dégage une énergie continuelle qui force l'attention de l'auditeur. L'aspect visuel est aussi très attractif : Emile Parisien joue avec l'espace, gesticule, entame avec le microphone une sorte de danse qui captive le regard, puis s'accroupit sur le devant de la scène pour laisser le champ libre à ses partenaires. On a le sentiment que l'investissement de chacun est total, tout en étant source de plaisir.
Les compositions alambiquées n'excluent pas un sens certain de l'humour, et développent néanmoins une dramaturgie prenante. Au fil des morceaux, jazz, rock, classique, contemporain se mêlent pour donner naissance à une musique pleine, dense, avec des moments de détente, souvent riches en trouvailles sonores, qui débouchent sur des moments de tension où le jeu expressif du saxophoniste fait merveille. Chaque musicien a la possibilité d'exprimer un style original à la croisée des genres, tout en favorisant l'expression collective. La batterie très précise de Sylvain Darrifourcq sait aussi se faire bruitiste grâce à l'utilisation de nombreux accessoires. De même, Julien Touery n'hésite pas à emprunter baguettes ou mailloches pour faire résonner son piano. Un jeu très marqué par la musique contemporaine , clusters, masses sonores, variation de volume, le tout avec une intensité prenante. La contrebasse, elle aussi utilise des techniques très contemporaines.
La musique, qui n'est pourtant pas d'un abord facile, impose pourtant son originalité. Même sur les arrangements de Wagner le quartet, qui fait preuve de beaucoup de cohésion, reste personnel. Quant à Emile Parisien, technicien remarquable, il est toujours en recherche - et il trouve ! - et exprime constamment un plaisir de jouer communicatif. On comprend donc pourquoi ce jeune groupe provoque un certain engouement de la part de la critique et du public. C'est amplement mérité.

Patrice Boyer

Photos de la balance et du concert par Dominique Rieffel